L’adoption massive d’un nouveau mode de consommation n’est jamais le fruit du hasard. Elle se veut le résultat d’un entremêlement de conséquences économiques, sociales et écologiques. Nous nous trouvons ainsi à la croisée des chemins, au cœur d’une société en pleine mutation. Nous avons entendu parler de sobriété. Nous avons collectivement pris conscience de la nécessité de réduire notre empreinte carbone et notre impact écologique.
Pourquoi la transition écologique du secteur de la mode relève-t-il de l’urgence ?
Par conséquent, l’affirmation de la seconde main s’inscrit dans une certaine logique. C’est d’autant plus vrai quand nous regardons à la loupe les réalités du secteur de la mode. À date, le bilan interroge, et met en exergue une profonde nécessité de transformation, alors que 100 milliards de vêtements sont encore vendus chaque année dans le monde. Cela représente 10kg d’habit par personne, et une hausse de 60% par rapport au début des années 2000. Beaucoup trop.
Quels sont les impacts de la mode sur l’environnement ?
L’impact d’une telle dérive est direct et visible. Par conséquent, l’industrie de la mode entraîne l’émission de 1,2 milliards de tonnes de gaz à effet de serre par an. La culture de coton mobilise 5% des surfaces agricoles mondiales. Un jean fait des milliers de kilomètres avant d’atterrir sur les portants de nos boutiques préférées et sa fabrication nécessite 11 000 litres d’eau. 60 milliards de m² de tissus sont jetés chaque année au moment de la coupe. Dans l’eau, les dégâts se font aussi ressentir. À titre d’exemple, 90% des microplastiques retrouvés sur les rivages étaient constitués de fibres textiles synthétiques.
Comment les consommateurs peuvent redéfinir l’industrie ?
Demain, si nous ne prenons pas garde et si rien ne change, ces chiffres continueront indéniablement d’augmenter. Alors quoi faire ? Mieux consommer, ou moins consommer ? Sûrement une subtile rencontre entre les deux. Parce que leurs attentes évoluent, les consommateurs et consommatrices obligeront les marques à se questionner et à se réinventer. En définitive, toute une logique est remise en cause. Car la seconde main pose les bases d’une transformation fondamentale, qui s’affirme dans un contexte d’inflation, en pleine crise écologique et dans la lignée des interrogations existentielles nées de la pandémie.
Pourquoi la seconde main passe de marché de niche à marché de masse ?
Nous passons progressivement d’un marché de niche à un marché de masse. Ainsi, au total, au cours des derniers mois, 64% des Français ont acheté au moins un produit d’occasion, selon les chiffres de BPI France. Les raisons sont multiples. Plusieurs motivations principales et cumulatives poussent les consommateurs et consommatrices à agir autrement : l’environnement, l’expression de soi, le pouvoir d’achat et la recherche d’originalité. En d’autres termes : les adeptes de la seconde main cherchent à combattre la surconsommation, à s’affranchir de la fast-fashion, à préserver les ressources naturelles et à trouver des pépites uniques, qui racontent et transmettent de belles histoires, le tout à un prix abordable.
Comment évolue la perception de la seconde main ?
À La Belle Armoire, nous avons remarqué cette évolution. Lorsque nous avons lancé notre boutique, dans le centre-ville de Chambéry, nous étions les premiers. Nous devions encore sensibiliser les consommateur•rice•s et démocratiser cette alternative à l’achat de vêtements neufs. Aujourd’hui, tout a profondément changé. Vous êtes de plus en plus nombreux à acheter d’occasion et à rejoindre le mouvement. Le nombre de friperies explose. Les plateformes en ligne se multiplient, avec Vinted, Depop et Vestiaire Collective comme fers de lance. Le sujet s’est largement imposé dans les médias.
Demain, la seconde main continuera de séduire les consommateurs et consommatrices. Il se dit même que le marché de la fripe dépassera celui de la fast fashion en 2028. La raison ? Ce mode de consommation s’inscrit dans une époque et infuse à chaque recoin de la société. De fait, il séduit toutes les générations. C’est d’ailleurs déjà le cas. Ce sont certes les millenials (25-37 ans) qui contribuent le plus à l’essor des friperies sur nos territoires. Pour autant, les générations plus âgées ne sont pas en reste. Chez les jeunes seniors, une personne sur deux a déjà acheté des produits en seconde main, d’après une étude de l’institut d’étude Moaï.
La seconde main, le modèle économique de demain ?
Dans ce cadre, il est fort à parier que nous sommes qu’au début d’une grande mutation, qui va nécessairement obliger les grandes marques et les acteurs de la mode à repenser leur modèle économique. Collectivement, nous pouvons ainsi tendre vers le mieux et contrecarrer les dérives de la fast-fashion. Choisir des vêtements élégants. Adopter un look original, hors des sentiers battus. Se faire plaisir sans impacter les ressources. La seconde main est l’avenir de tout un secteur. Elle devrait non seulement continuer de progresser, mais également s’émanciper sur d’autres marchés, au-delà de la mode : les jouets, l’électroménager, le matériel de bricolage.